Trois "MAGNIFICAT"




On imagine Monteverdi, Vivaldi et Rutter devant leur page blanche pour écrire ce cantique à la Vierge. Un saut dans l’inconnu pour Monteverdi, lorsque, sous l’impulsion de quelques-uns dont il faisait largement partie, se découvre en Occident l’immense champ de la polyphonie. Pas plus simple pour Rutter, où tout semblait être déjà dit et écrit sur ces paroles répétées depuis 20 siècles… Des questions autres mais tout aussi prégnantes pour Vivaldi, très habitué à l’opéra qu’il était interdit ici de vouloir transposer un tant soit peu….
Première remarque qui saute aux yeux lors d’une première lecture des partitions, c’est le soin extrême apporté par tous trois au verset Et misericordia. Manifestement ils apparaissent comme la page centrale de chacune des trois œuvres. On ne saurait lequel choisir, mais la beauté indicible de l’un n’est égalée que par celle des deux autres !

Monteverdi y atteint une plénitude extraordinaire basée sur le plain-chant, opposant les voix féminines aux voix d’hommes

(Vierge du Magnificat)
Botticelli (1444/1445-1510)
Florence, Galerie des Offices

Le Magnificat de Vivaldi doit d’ailleurs sa célébrité à ce mouvement, qui y tient une place centrale, et qui atteint une beauté formelle qu’ont seulement approchés un Mozart dans le Qui tollis de la Messe en ut, ou J S Bach dans le Crucifixus de la Messe en si.


Rutter, lui, fait intervenir tout au long du "Et misericordia" le chant quasi désincarné de la soprano soliste qui plane sur les harmonies audacieuses du chœur.

St Luc peignant la vierge ( détail) Arcabas, Musée départemental d'art sacré